Contexte et justification
L’agriculture africaine de façon générale et celle des États de l’Afrique de l’Ouest en particulier, souffrent d’une faible utilisation des engrais par les producteurs. Cette lacune tient à plusieurs facteurs. D’une part, la production locale d’intrants est très limitée, ce qui rend le secteur agricole dépendant des importations, dont les prix connaissent une forte volatilité. D’autre part, les acheteurs – États, acteurs privés de l’agribusiness, coopératives ou encore petits paysans – disposent d’un budget contraint, tout en faisant face à des écueils logistiques (réseaux de distribution) qui compliquent l’accès aux produits.
Ces contraintes n’ont pas permis à l’Afrique d'exploiter l'énorme potentiel de son secteur agricole et de produire suffisamment d’aliments pour nourrir sa population et relever les défis de la sécurité alimentaire et de la nutrition. C'est dans l’optique d’améliorer la situation que le Sommet africain des engrais a été organisé à Abuja au Nigéria en juin 2006. La Déclaration d'Abuja avait recommandé des efforts pour augmenter les niveaux d'utilisation d'engrais en Afrique de 8 kg/ha à au moins 50 kg/ha en 2015.
A la suite de ce sommet, les Commissions de la Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), ainsi que le Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) ont signé un accord tripartite pour la mise en œuvre de réglementations harmonisées sur les intrants agricoles (semences, pesticides et engrais). Ainsi, un règlement harmonisé C/REG.13/12/12 relatif au contrôle de la qualité des engrais a été adopté par le Conseil des Ministres de la CEDEAO en décembre 2012. Ensuite, un Règlement d'exécution ecw/pec/ir/05/12/16 relatif aux attributions, à l'organisation et au fonctionnement du Comité ouest africain de contrôle des engrais (COACE) a été signé par le Président de la Commission de la CEDEAO en décembre 2016.
Le COACE a pour mission d’accompagner les pays (15 États membres, Tchad et Mauritanie) et les acteurs régionaux pour la mise en œuvre de la réglementation harmonisée sur les engrais. Il bénéficie en cela de l’appui du Centre international pour le développement des engrais (IFDC). Ainsi, neuf (9) pays ont déjà mis en place leur comité national de contrôle de la qualité des engrais.
Cependant, malgré toutes ces initiatives et les avancées enregistrées depuis le Sommet d’Abuja, force est de constater que la productivité et la production agricoles restent toujours insuffisantes en Afrique de l’Ouest. L’utilisation des engrais est encore à des niveaux bas - en moyenne 20 kg par an et par hectare - très éloignés des objectifs adoptés de 50 kg de nutriments par hectare. Le corollaire est le recours important aux importations de denrées alimentaires, l’augmentation continue depuis 2010 de la frange des populations touchées par l’insécurité alimentaire et la faim, tout cela dans un contexte d’insécurité croissante, de dérèglements climatiques et de baisse de la fertilité des sols.
La fragilité du secteur des engrais en Afrique de l’Ouest a été mise à nue avec la guerre Russie-Ukraine au début de 2022. En effet, ces deux pays sont d’importants fournisseurs mondiaux d’engrais et de matières premières servant à leur fabrication et leur conflit a crispé le marché, engendrant flambée des prix et pénuries en Afrique de l’Ouest.
Ce contexte a expliqué la mobilisation générale au niveau régional, sous l’égide de la CEDEAO et de la Banque mondiale qui ont organisé une table ronde de haut niveau sur les engrais et la santé des sols en Afrique de l'Ouest et au Sahel les 30 et 31 mai 2023 à Lomé. Deux résultats importants sont issus de cette rencontre : i) la Déclaration de Lomé qui met en exergue les engagements clés des États membres pour améliorer la santé et la fertilité des sols et renforcer la résilience des agriculteurs et des systèmes de production face aux changements climatiques et à d'autres chocs exogènes et ii) une feuille de route.
Cette déclaration et la feuille de route ont été adoptées par les Ministres et les Chefs d’Etats et endossées par le Conseil des ministres de la CEDEAO lors de sa quatre-vingt-dixième session ordinaire tenue les 6 et 7 juillet 2023 à Bissau, en République de Guinée-Bissau.
La feuille de route s’inscrit dans le cadre du nouveau Plan d’Action pour les Engrais et la Santé des sols en Afrique, afin de proposer un cadre opérationnel pour la région, basé sur l’identification d’actions prioritaires pour permettre aux différents partenaires d’y situer leurs prochaines contributions au sein d’une stratégie bien articulée.
Les douze (12) actions prioritaires définies à l’issue du processus de consultations, sont spécifiques à la région et doivent permettre d’orienter de manière pratique les engagements futurs des différents partenaires au sein d’un cadre cohérent.
Pour opérationnaliser la Déclaration de Lomé sur les engrais et la santé des sols et sa feuille de route, la CEDEAO envisage de procéder au recrutement d’un Expert en Partenariat Public Privé (PPP) pour le développement du marché régional des engrais. Cet expert doit appuyer les États pour qu’ils soient en mesure de négocier des accords, de les superviser et de les gérer efficacement. Il sera pris en charge sur le financement de la Banque Mondiale dédié à la mise en œuvre du Programme de Résilience du système Alimentaire en Afrique de l’Ouest.
- Justification du besoin de consultant sur le PPP
Parmi les contraintes qui limitent l’accès des producteurs aux engrais minéraux et organiques en Afrique de l’Ouest, la faiblesse des investissements dans le secteur notamment dans les installations de production, d’entreposage, de distribution et de commercialisation est souvent mis en avant. Or, huit pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Ghana, Mali, Nigéria, Sénégal et Togo) disposent de phosphates et/ou de gaz naturel, matières premières entrant dans la production d’engrais. Ces États exportent en priorité ces matières premières à l’état brut (excepté le Nigéria) et restent dépendants des engrais importés pour la production agricole en raison entre autres, des besoins élevés en capitaux. Ces besoins d’investissements concernent également les sources complémentaires de nutrition des plantes et de santé du sols (engrais organiques et organo-minéraux, biofertilisants, biostimulants, amendements de sols etc.).
Dans l’optique d’amplifier les efforts d’investissement pour renforcer l’offre en infrastructures et services de qualité dans le secteur des engrais, le recours au partenariat public-privé (PPP) est une option pour les pouvoirs publics. Le développement du PPP, tout en permettant de bénéficier des atouts et des capacités de financement et de gestion du secteur privé, vise à assurer un approvisionnement suffisant et régulier en fertilisants. Une amélioration notable de l’offre permettra aux producteurs d’augmenter leur niveau de consommation en engrais et d’intensifier ainsi leurs productions agricoles, ce qui améliorera à long terme la sécurité alimentaire régionale.
Outre l’apport financier, le PPP orienté vers les engrais organiques renforce la résilience vis-à-vis des aléas climatiques (l’humidité est mieux conservée par l’humus) et l’augmentation de la matière organique des sols est un moyen peu coûteux de stocker du carbone.
Le recrutement d’un expert qualifié en PPP dans le secteur des engrais a pour objectif de renforcer les capacités des États et à les soutenir techniquement pour la mise en place d’un environnement favorable à la promotion du PPP en Afrique de l’Ouest.
Les présents termes de référence sont élaborés pour donner des orientations et préciser les conditions de recrutement de l’expert.
- Tâches Principales de l’Expert en PPP
Placé sous l’autorité du Directeur de l’Agriculture et du Développement Rural de la CEDEAO, l'expert travaillera en étroite collaboration avec l’IFDC, le Secrétariat permanent du COACE et l’Expert en sauvegarde environnementale du FSRP. Il sera chargé de :
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- Renforcer les capacités des autorités publiques des pays ciblés, parties prenantes au processus PPP pour acquérir des connaissances techniques et organisationnelles, nécessaires pour mieux gérer le montage des dossiers PPP dans le domaine des engrais ;
- En partenariat avec l’expert en politique, appuyer, les actions de modification ou de renforcement du cadre politique et réglementaire afin de créer un environnement plus favorable au développement de toute forme de partenariat public privé ;
- Accompagner les pays dans le processus PPP, notamment dans l’analyse préalable, la contractualisation et la mise en œuvre des projets de construction d’infrastructures de production, d’entreposage, de transport et de commercialisation d’engrais ;
- Établir et entretenir des relations avec les organisations du secteur privé de l'industrie des engraisainsi qu’avec les organisations de producteurs, dans les pays cibles ;
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- Collaborer avec les institutions financières, les bailleurs de fonds et les fondations pour concevoir des modèles de financement qui répondent aux besoins des distributeurs et des négociants en produits agricoles dans le secteur des engrais, en tirant partie des partenariats existants pour la durabilité ;
- Diffuser régulièrement des études de marché et des opportunités d'investissement dans le secteur des engrais auprès des parties prenantes, en coordination avec les acteurs existants de l'industrie ;
- Initier et gérer des partenariats public-privé (PPP) pour développer la production d’engrais et améliorer l'approvisionnement en cet intrant, en partenariat avec les parties prenantes.
- Principaux livrables attendus de l’expert
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- Au moins sept (7) dossiers PPP sont préparés ;
- Au moins quatre (4) protocoles d'accord ou de négociation sont signés entre les États et le secteur privé ;
- Une plateforme d’information sur le marché, les opportunités d’investissements, sur les PPP aboutis est mise en place ;
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- Au moins trois (3) ateliers régionaux de renforcement de capacités sur le PPP sont conduits.
- Profil de l'Expert :
L'expert recherché devra satisfaire aux exigences de qualification et d’expériences suivantes :
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- Être titulaire d’un diplôme de formation supérieure (Bac+5) en droit public et/ou en droit des affaires, en gestion des entreprises, en commerce international, en finance internationale ou tout autre diplôme équivalent ;
- Avoir une expérience confirmée d’au moins huit ans dans le conseil en transactions, la conduite ou l’assistance à des gouvernements, des autorités contractantes ou des entités privées en matière de montage juridique de projets PPP ;
- Avoir réalisé au moins trois (3) missions dans l’élaboration de textes juridiques et/ou la mise en œuvre d’un projet PPP ;
- Disposer d’une bonne connaissance du secteur agricole, du secteur des engrais et de ses acteurs ainsi que des politiques agricoles en Afrique de l’Ouest ;
- Avoir travaillé dans une institution régionale en Afrique de l’Ouest (CEDEAO, UEMOA, CILSS,
CORAF, etc.) est un atout ;
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- Parler couramment l’une des trois langues de la CEDEAO à savoir le français, l’anglais ou le Portugais et avoir une bonne connaissance de l’une des deux autres.
- Lieu d'affectation et durée de la mission
L'expert sera basé à la Direction de l’Agriculture et du Développement Rural à Abuja, Nigéria. La durée de la mission est pour toute la durée de vie du Projet après une période probatoire de six mois. Cependant, le consultant retenu bénéficiera d’un contrat annuel renouvelable pour la durée du projet. Le poste est à temps plein.
- Processus de sélection
Le processus de sélection se déroulera en deux phases :
- Phase d’analyse des CV : à l’issue de cette phase, les candidats seront classés par ordre de mérite sur la base des notes obtenues à l’évaluation des CV. Seuls les six (06) premiers candidats (es) ayant été présélectionnés (es) après l’évaluation des CV et qui ont obtenu la note minimale de qualification de 75 sur 100, seront contactés pour la phase d’interview ;
- Phase d’interview : les candidats présélectionnés seront interviewés individuellement par un panel constitué par les membres d’un comité d’évaluation. Le meilleur candidat à l’issue de l’interview sera retenu pour les négociations d’un contrat.
- Dossiers de candidatures
Le dossier de candidatures doit être constitué de :
- Une lettre d'intérêt signée, indiquant le délai de disponibilité ;
- Un curriculum vitae récent et signé détaillant l'expérience professionnelle et les missions similaires ;
- Trois références professionnelles (nom et prénom, fonctions actuelles et antérieures, adresse électronique et numéro de téléphone) ;
- Copie certifiée conforme du diplôme le plus élevé dans le domaine concerné ;
- Copies des certificats de travail ou de service mentionnés dans le CV.
- Réception des demandes
La candidature présentée sous le format PDF unique doit être déposée au plus tard le 11 janvier 2026 –
à 23H 59 GMT à travers un téléchargement à l’adresse https://bit.ly/4qrgOzD.
L’ARAA se réserve le droit de ne pas considérer les candidatures qui ne satisfont pas aux exigences susmentionnées.
- Processus de sélection
Un consultant sera sélectionné conformément à la méthode de sélection des consultants individuels décrite dans le "Règlement des marchés publics" de la Banque mondiale.
Un entretien visant à évaluer les connaissances, les compétences et les aptitudes peut être organisé avec les meilleurs candidats.
Seuls les candidats présélectionnés seront contactés. L’ARAA se réserve le droit d'annuler ce processus de recrutement au besoin
- Demande d'informations complémentaires
Les consultants intéressés peuvent obtenir de plus amples informations en écrivant aux adresses électroniques suivantes :procurement@araa.org cc : ctienon@araa.org ; LBARNABO@ARAA.ORG avec l'objet « SCI 09B-Expert PPP -FSRP ».qwxs